Lors de la 38e Rencontre internationale et interconfessionnelle des religieux et religieuses à Sankt-Niklausen, sœur Annemarie de Pomeyrol représentait la communauté. Elle a lu le message que Sœur Danielle avait rédigé pour la rencontre 2020 annulée à cause du Covid.
1969… Le Père Julian Hernando et quatre Missionnaires de l’Unité arrivaient à Pomeyrol au cours d’un pèlerinage œcuménique. Ils étaient allés à Granchamp (en Suisse), Darmstadt (en Allemagne) et sur le chemin du retour Pomeyrol – trois communautés protestantes nées des détresses de ce temps et porteuses du message évangélique pour le monde en quête d’espérance. Vies données, consacrées, communautaires, s’engageant dans la pauvreté, l’obéissance, le célibat à cause du Royaume. Granchamp et Pomeyrol, liées aux frères de Taizé, guidées par une même règle avec cette même aspiration à vivre l’esprit des Béatitudes dans la joie, la simplicité, la miséricorde.
Ce passage à Pomeyrol nous semble dans le plan de Dieu. Depuis sa fondation, la Communauté prie tous les dimanches, aux Vêpres, pour l’Unité de l’Église pour laquelle le Christ a prié ; pour que les Chrétiens reçoivent l’intelligence de cette unité, pour qu’ils la croient, la pensent, la vivent et qu’elle domine leurs diversités. Ce premier contact fut chaleureux. La pensée de Don Julian venait au-devant du désir de Sœur Antoinette Butte, notre fondatrice : une rencontre interconfessionnelle et internationale de religieuses au cours de laquelle les sœurs pourraient prier ensemble et ensemble s’encourager dans la vocation commune. Rendez-vous fut pris pour Granchamp !
En 1970, ces rencontres avaient quelque chose de prophétique. Le charisme de Don Julian fut que nous avons pu dans la joie et la simplicité vivre une véritable expérience de communion ; et dans nos pays respectifs, les responsables de nos Églises ont pu voir que « vivre l’unité dans la diversité » c’était possible : il suffisait d’y croire. C’est Dieu qui fait !
1973, rencontre à Pomeyrol – je me lie à sœur Pilar, Reparadora aux Canaries. J’ignorais qu’elle complotait un séjour pour moi, qui parlait espagnol, dans leur fraternité à Grand Canaria pour vivre une présence œcuménique au « Templo ecuménico » à Playa del Inglés. Il s’agissait d’être une présence protestante dans la pastorale des touristes qui venaient des pays du Nord, des luthériens – Nous n’avons pas donné suite, mais Doris, notre compagnon y a fait plusieurs séjours
La Communauté de Pomeyrol a été fidèle dans ces rencontres
Don Julian était un homme de foi. Quelle joie, quel exaucement, lorsqu’il nous a entraînées à Zagreb en… 1985 ! Sœur Élisabeth, responsable de Pomeyrol, et sœur Ursula, coordinatrice de notre ministère en Yougoslavie, trouvaient dans cette rencontre un Amen de Dieu sur notre engagement. Une de nos Compagnons orthodoxes nous a accompagnées.
1987 : Une sœur orthodoxe et deux sœurs catholiques, toutes trois yougoslaves, furent « embarquées » dans la voiture de Pomeyrol vers la Roumanie.
Le Père Hernando et le Métropolite Emilianos Timiadis veillaient. La foi peut déplacer les montagnes : lorsqu’un homme consacre sa vie à la réconciliation et à la paix, à cause du Royaume, le Seigneur ouvre les chemins. En novembre 1989, lorsque les murs de fer et de béton s’effondrent, les Rencontres de religieuses y ont peut-être creusé une brèche !
La 25e rencontre nous retrouve à Granchamp. J’étais nouvelle prieure, j’ai reçu là, la confirmation, que ce que nous vivions le 6 août à Pomeyrol, lors de la Rencontre œcuménique de la Transfiguration, n’était pas un événement isolé, mais portait la même vision de l’Église que celle des Missionnaires de l’Unité : une réponse à l’attente du monde.
Puis, nous n’avons plus participé régulièrement à ces rencontres. L’ouverture aux religieuses et religieux en faisait une rencontre comme les autres et la Communauté, toujours très sollicitée en été et amoindrie par l’âge et les santés, s’est concentrée sur l’accueil à Pomeyrol.
Pourtant, notre sœur Élisabeth, d’origine allemande et dont la vocation s’inscrit dans le mot réconciliation, a encore pu bénéficier de l’amitié du Père Hernando en participant au voyage en Pologne avec une visite à Auschwitz. Ce fut son dernier grand déplacement, un temps fort de sa vie.
C’est notre sœur Ursula qui fut la plus fidèle. Joyeuse de ce contact avec nos amis de l’Est. Par sa connaissance de l’allemand et du serbo-croate, elle a lié de nouvelles amitiés en Yougoslavie, Roumanie, Bulgarie. Sa santé ne lui a plus permis les déplacements, mais sa fidélité n’a jamais fait défaut. En 2010, elle était à Rila, avec sœur Christiane, si heureuse de retrouver « ses » sœurs avec qui elle avait lutté devant Dieu sur le chemin de la liberté.
Malgré l’éloignement, nous n’avons jamais cessé de porter les Rencontres dans la prière. Ce fut une vraie joie, en 2012, d’accueillir frères et sœurs dans notre vie œcuménique : Sainte Cène à Pomeyrol, Messe à l’Église du village, célébrée par l’Évêque d’Aix, si fraternel envers nous, Divine Liturgie à Saint Gabriel. Cette chapelle du XIIe siècle, où nous célébrons la fête de la Transfiguration, nous est chère, car elle est témoin de notre unité à travers les siècles. La visite aux frères de l’Abbaye de Sénanque marquait la force de la communion enracinée dans l’histoire. Jésus, le Christ, Seigneur de l’histoire. Il y eut aussi sœur Joëlle, avec sœur Pascale, Franciscaine, sur les traces de Saint François (à Assise), et enfin sœur Annemarie à Selbitz. Pour nos sœurs allemandes, c’était un acte important : ce mur qui avait séparé les familles était tombé. Mais ce n’est qu’en 2018 que sœur Annemarie retrouvait enfin sa cousine et ses enfants !
Les Rencontres ont souvent croisé notre vie communautaire, nous avons beaucoup reçu et pour terminer je reviens sur ce qui a été le point de départ : le Père Julian et les Missionnaires de l’Unité, sœur Agueda et cette communion signifiée par la croix de l’oratoire del « Centro ecuménico » faite avec le bois d’un arbre de Pomeyrol, façonné par nos amis allemands, et apportée par notre Compagnon Nicola et son mari (couple mixte), pasteure à Perpignan.
Que de signes ! Le Seigneur, présent dans son Église a béni l’aventure œcuménique du Père Hernando et Monseigneur Emilianos : deux hommes réunis par leur Seigneur, dont ils furent les serviteurs fidèles et obéissants. Communion des saints du ciel et de la terre.